Attention, réflexion, rédaction : leur qualité est directement corrélée à la qualité d’apprentissage.

Comment être plus attentif en cours, ne pas « zapper » une explication importante donnée par l’enseignant ? Comment être sûr qu’on a bien noté l’essentiel et que notre distraction ne nous en a pas fait perdre les miettes les plus précieuses du cours ? 

 

Comment structurer sa réflexion, la développer de façon construite, l’argumenter ?

 

Comment apprendre à mieux rédiger, à construire des écrits à la fois rigoureux et agréables à lire, qui mettent à valeur une pensée riche et structurée, articulée à une consigne dont les enjeux ont été bien identifiés et compris ?

 

A toutes ces questions, il existe une réponse unique et commune : apprenez (vos cours) régulièrement et avec les bonnes méthodes. 

 

Comment apprendre ?

 

Pour apprendre correctement un cours, une notion, il faut y revenir plusieurs fois, à des moments différents, notamment en s’aidant des fiches d’auto-évaluation et de mémorisation que j’apprends aux élèves à réaliser. Il faut donc se construire un planning d’apprentissage et de révision très rigoureux. Ce planning doit toujours indiquer le temps consacré à chaque notion, à chaque matière. Travailler en temps limité en décomposant l’apprentissage en plusieurs étapes est par ailleurs le moyen le plus efficace qu’on ait trouvé pour engager et maintenir son attention. Il faut suivre ce planning en travaillant avec des outils d’auto-évaluation qui permettent d’alterner phases d’apprentissage et phases de test, ce qui reste la meilleure façon d’apprendre qui soit.

 

Il faut ensuite s’obliger à résumer avec ses mots ce qu’on vient d’apprendre, en faisant des liens entre les différentes composantes de la notion, mais aussi des liens avec d’autres notions, un peu comme si on devait expliquer le chapitre ou le cours à un enfant qui ne connaît rien au sujet : en peu de temps, de façon claire, précise, illustrée par un ou deux exemples.

 

Pour cela il faut à la fois travailler son cours au niveau « micro », en apprenant les définitions importantes par exemple, et à la fois au niveau « macro », en en comprenant les grandes lignes qui en font le fil rouge, en étant capable de savoir à quelle problématique, quelles questions répond le cours.

 

Il ne faut pas hésiter à sur-apprendre. Il vaut toujours mieux apprendre moins (moins de faits, de dates, de chiffres) mais mieux. Ce sur-apprentissage va permettre à la mémoire de travail de récupérer facilement les connaissances en mémoire à long terme pour les traiter, les manipuler, les ordonner, les structurer quand vous avez un devoir qui vous demande de réfléchir à une notion et à une problématique « à l’aide des documents fournis à analyser et de vos connaissances ». Sans cela des noeuds se forment dans votre cerveau ! 

 

Quel impact sur l’attention ?

 

Quand vous arrivez à un cours en ayant régulièrement appris les cours précédents, en les ayant révisé une fois encore la veille, vous êtes beaucoup plus attentif, vous captez beaucoup plus d’informations, vous en comprenez mieux les détails et les enjeux, vous comprenez et captez mieux les éléments divers qui vous sont présentés et leur intérêt. 

 

Par exemple, vous serez beaucoup plus captif en suivant le cours sur la montée du nazisme dans l’Allemagne d’Hitler si vous savez le diktat qu’a représenté pour l’Allemagne le traité de Versailles ; vous comprendrez mieux la montée de l’extrême droite dans d’autres pays d’Europe dont la France, juste avant l’arrivée du front populaire, si vous avez retenu une des causes communes à ce phénomène : la grande crise économique de 1930 et ses conséquences.

 

En mathématiques, vous ferez moins « d’erreurs d’inattention » sur un exercice impliquant le théorème de Pythagore si vous savez de façon automatique et sûre ce qu’est un nombre au carré par rapport à une racine carrée, et comment se résout une équation à une inconnue. 

 

Apprendre c’est greffer une information nouvelle à un réseau de connaissances déjà en mémoire en faisant des liens. Si je vous dis que j’ai cueilli une Fadosila dont les exhalaisons subtiles me ravissent, vous comprendrez aisément de quoi je parle, même si c’est la première fois que vous entendez ce mot, sauf si vous ne savez pas ce que signifient cueillir et exhalaisons. Et vous serez capable, plus tard, en situation de restitution, à la question « qu’est-ce qu’une Fadosila ? », de répondre : « une fleur, donc un végétal, qui se nourrit de terre, a des feuilles, des pétales, des étamines, qu’on peut cueillir et mettre dans un vase, qui sent très bon etc ». Vous avez instantanément construit tout un réseau de connaissances à partir d’un mot inconnu, grâce aux connaissances automatisées que vous possédez en mémoire, qui vous ont permis de faire des liens sans effort, en moins d’un dixième de seconde. Si pour reprendre l’exemple précédent vous ne savez pas ce que signifie exhalaisons, (parce que vous n’avez pas bien appris votre définition, dans le cadre d’une cours) vous risquez de faire un contre-sens et de répondre « une plante » ou même « un fruit ». 

 

Quand on a bien appris les cours précédents, on comprend mieux les informations nouvelles, on les capte plus facilement, on fait plus de liens, on mémorise mieux, on est plus attentif. Plus on a des connaissances solides, plus c’est facile d’apprendre, et moins cela nécessite de mobiliser effort et ressources attentionnelles. Et mieux on peut réfléchir. 

 

Quel impact sur la réflexion (et donc encore sur l’attention) ?

 

Réfléchir, c’est faire des liens entre nos connaissances puis entre ces connaissances et des informations ou des situations nouvelles. Pour cela il faut mobiliser toute son attention. Ce qu’on va dire ici concernant la réflexion vaut donc aussi pour l’attention. 

 

On ne peut donc pas réfléchir correctement si notre base de connaissances n’est pas assez solide et stable, car les efforts pour aller retrouver ces connaissances en mémoire à long terme vont fragiliser l’attention et la réflexion. 

 

Il  faut s'être entraîné souvent à récupérer en mémoire à long terme des connaissances pour pouvoir les intégrer dans une solide réflexion. Les allers-retours entre mémoire de travail (mémoire vive qui permet de retrouver, sélectionner, ordonner, maintenir à l’esprit les connaissances utiles à notre réflexion le temps de les combiner pour effectuer la tâche demandée) et mémoire à long terme (mémoire de stockage des connaissances) doivent avoir été entraînés, pratiqués de nombreuses fois. Ainsi la trace mnésique correspondante devient comme une route rapide, sûre, automatique, qui amène instantanément à notre réflexion les connaissances sur lesquelles cette dernière a besoin de s’appuyer. S’il faut faire trop d’efforts pour récupérer ces connaissances en mémoire à long terme, on perd le fil de sa réflexion. Et-ou on se fait reprocher de manquer d’attention !

 

Reprenons l’exemple du cours d’histoire. Si le jour de l’évaluation on vous demande de réfléchir, « à l’aide des documents fournis et de vos connaissances » (rappel : c’est ainsi que sont formulés la plupart des sujets dHG, de sciences, de français, de philo, de sciences économiques et sociales etc. du brevet jusqu’au bac) sur les points communs de la montée du totalitarisme en Europe entre 1919 et 1939, vous ne pourrez pas problématiser le sujet correctement, ni développer et construire votre réflexion, si vous n’avez pas assez de connaissances sur lesquelles vous appuyer. Vous n’y arriverez pas non plus si vous en avez de très (trop) nombreuses, mais acquises trop vite, donc que vous n’avez pas assez réactivées : votre mémoire de travail aura trop d’efforts à faire pour aller les récupérer en mémoire à long terme et trier celles qu’il est judicieux de « ramener » et celles au contraire qui vont entraver votre réflexion et vous mener hors-sujet. Vous allez oublier la ou les deux ou trois dates-clés (et on vous attend au tournant !), vous allez être hors-sujet, votre réflexion va être confuse… 

 

Plus donc et mieux vous connaissez un cours, plus et mieux vous l’avez appris en distribuant vos apprentissages sur plusieurs séances, plus vous aurez entraîné votre mémoire de travail à récupérer en mémoire à long terme les connaissances associées à ce cours, plus et mieux vous serez capables de réfléchir.

 

C’est pour cette raison qu’il est parfois préférable d’en savoir « moins, mais mieux ». Parfois préférable de ne connaître que quelques dates, mais les bonnes, choisies après réflexion et analyse, en sachant leur intérêt, en s’entraînant à les mobiliser dans un résumé construit, que trop de dates auxquelles on ne comprend rien et dont on ne sait pas dire en quelques mots quelle histoire elles racontent, quelle histoire les relie, comment et pourquoi…Et pour cela aussi qu’il ne faut pas hésiter à « sur-apprendre », comme expliqué plus haut (comment apprendre ?).

 

Quel impact sur la rédaction ?

 

Rédiger correctement, c’est exprimer sa réflexion en combinant correctement des mots et des idées. Comment rédiger bien si on manque de connaissances solides associées à ces mots et idées ? Ou si notre réflexion est trop fragilisée par une grande quantité de connaissances insufisamment comprises et automatisées (voir paragraphe plus haut) ? Le mot juste, c’est un mot qui désigne un concept maîtrisé. La meilleure façon d’apprendre à bien rédiger, donc à bien exprimer ses idées et sa réflexion, c’est de commencer à apprendre avec méthode ses cours, pour être capable de les restituer en situation de transfert, c’est à dire dans un contexte nouveau et complexe. 

 

Bien-sûr, il existe des méthodes pour apprendre à bien rédiger, et ces méthodes je les donne à mes élèves en cours. Rédiger une problématique ; faire un plan ; rédiger une introduction ;  structurer un développement avec des paragraphes qui chacun exprime une idée, des arguments, des illustrations analysées ; unir ces paragraphes avec les bons connecteurs logiques (Certes… D’abord… Ensuite…Cependant… En effet… D’autre part… Finalement…) ; rédiger une conclusion qui résume les arguments principaux de notre argumentation et propose une ouverture… Tout cela s’apprend comme on apprend le piano ou à marquer un but. Mais comme pour la musique ou le sport, la technique sans connaissances de base automatisées ne permet pas à elle seule de progresser.

 

PS concernant l’attention : les problèmes d’attention étant des problèmes d’inhibition (cf article du blog « comment apprend-t-on ? »), on pourra me rétorquer qu’ils ne peuvent se réduire à une mauvaise qualité d’apprentissage. Par contre l’inhibition se contrôle par un temps de recul réflexif, et la qualité de la réflexion dépend bien de la qualité d’apprentissage.

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